Le Burkina-Faso exhume Sankara

24/03/2015
Le Burkina-Faso exhume Sankara

Le Che africain a été inhumé au cimetière de Dagnoën

Un juge d'instruction a été saisi dans l'affaire Thomas Sankara, président du Burkina Faso assassiné en 1987 lors d'un coup d'Etat, dont les proches demandaient depuis des années la réouverture du dossier.

Le commissaire du gouvernement du tribunal militaire nous a confirmé samedi que le dossier a effectivement été transféré à leur niveau et que l'ordre de poursuite a enfin été donné, a déclaré Me Bénéwendé Sankara, qui n'a pas de lien de parenté avec l'ex-président.

Un haut responsable judiciaire burkinabè a confirmé cette procédure, sous couvert d'anonymat. Le dossier est arrivé. L'ordre de poursuite a été signé, un juge d'instruction a été saisi, a-t-il indiqué.

Le capitaine Thomas Sankara, arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 1983, a été tué quatre ans plus tard lors du putsch qui a porté Blaise Compaoré au pouvoir. Le régime de M. Compaoré, balayé fin octobre par des manifesations de rue après 27 ans de règne, avait toujours refusé de rouvrir son dossier.

Le président Michel Kafando, qui a succédé en novembre à Blaise Compaoré, avait à l'inverse promis que justice serait rendue dans ce dossier très symbolique au Burkina Faso.

Nous sommes allés féliciter le président (Kafando) pour avoir tenu ses engagements, a déclaré Me Bénéwendé Sankara.

Les chefs d'inculpation ne sont pas encore connus, selon l'avocat de la famille Sankara : remettre la procédure à plat suppose refaire une instruction très sérieuse dans le cadre de ce dossier, donc c'est un véritable combat titanesque qui commence.

La figure de Thomas Sankara, révolutionnaire loué pour son intégrité et icône du panafricanisme, a été abondamment revendiquée durant le soulèvement populaire qui a conduit à la chute du président Compaoré.

Début mars, le gouvernement avait déjà autorisé l'exhumation du corps de Thomas Sankara, dans le but de l'identifier formellement.

Le Che africain avait été inhumé au cimetière de Dagnoën (quartier est de Ouagadougou), mais sa famille et ses nombreux partisans doutent qu'il s'agisse vraiment de sa dépouille.

Après avoir échoué auprès des tribunaux burkinabè, sous le régime Compaoré, à faire effectuer des tests ADN pour trancher cette question, la famille avait saisi la Cour africaine des droits de l'Homme, qui avait ordonné en 2008 au gouvernement du Burkina Faso d'autoriser les expertises nécessaires, en vain.

Le Burkina Faso a entamé mardi des états généraux de la justice en vue de réformer ce pilier républicain très critiqué sous le régime Compaoré.

Citoyens, presse, ONG et même gouvernants dénonçaient constamment la corruption rampante et l'impunité érigée en système de gouvernance alors que des membres du gouvernement Compaoré avaient reconnu publiquement que des juges étaient acquis au pouvoir.

Des réflexions sont actuellement menées sur des réformes qui permettront à la Haute Cour de Justice de juger des dirigeants pour des crimes de haute trahison et attentat à la Constitution commis dans l'exercice de leurs fonctions, a annoncé mardi la ministre de la Justice Joséphine Ouédraogo lors des états généraux. Elle n'a pas précisé si ces réformes auraient un effet rétroactif.

Une trentaine d'organisations de la société civile avaient réclamé fin février des poursuites judiciaires pour attentat à la Constitution contre les membres du dernier gouvernement de Compaoré, des hauts dirigeants de son parti et des partis alliés qui avaient soutenu un projet de révision constitutionnelle visant à le maintenir au pouvoir au-delà de la fin de son dernier mandat.

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