Réforme de la constitution en Algérie

07/02/2016
Réforme de la constitution en Algérie

La ville d'Alger

Le Parlement algérien a adopté dimanche une réforme de la Constitution voulue par le président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 17 ans. L'adaptation constitutionnelle dessine les contours du système une fois qu'il laissera les rênes du pays.

Devenu tout-puissant après avoir réduit l'influence des services secrets, Abdelaziz Bouteflika a finalement soutenu cette réforme, évoquée pour la première fois en 2011, année du Printemps arabe. La principale disposition prévoit le rétablissement de la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels.

C'est M. Bouteflika, lui-même, qui avait supprimé cette limitation. Elu en 1999, puis réélu en 2004, il avait ensuite brigué un troisième puis un quatrième mandat, éveillant les soupçons d'un désir de présidence à vie. Le texte écarte désormais cette possibilité.

Agé de 78 ans, le chef de l'Etat est affaibli par la maladie. Il pourra toutefois terminer son quatrième quinquennat qui court jusqu'en 2019 et même en briguer un cinquième s'il le souhaite.

La révision de la Constitution interdit, par ailleurs, aux Algériens ayant une autre nationalité l'accès aux hauts postes dans la fonction publique. Cette mesure a suscité la colère de la communauté franco-algérienne, estimée à des centaines de milliers de personnes.

Cette révision de la Constitution, voulue par le chef de l'Etat mais critiquée par l'opposition, a été approuvée par 499 parlementaires. Deux ont voté contre et 16 se sont abstenus, a précisé le président du Sénat, Abdelkader Bensalah. Pour être adoptée, la révision devait recueillir l'adhésion de trois quarts des 462 députés et 144 sénateurs.

Le Premier ministre Abdelmalek Sellal a salué un président "architecte de la nouvelle République algérienne". Tout en restant méfiant, l'opposant Djamel Zenati juge qu'"avec les présents changements, le texte fondamental du pays réunit enfin les principaux matériaux nécessaires à la construction démocratique".

Mais comme "le viol de la loi est devenu la loi" cela "n'incite guère à accorder un soupçon de sincérité" au pouvoir, ajoute-t-il dans une tribune publiée par le quotidien El Watan.

Plus critique, l'ancien Premier ministre Ali Benflis, deux fois adversaire malheureux de M. Bouteflika, a dénoncé un "coup de force constitutionnel" pour "régler les seuls problèmes du régime politique en place et non ceux du pays".

La révision de la Constitution intervient quelques jours après la dissolution par le président du Département du Renseignement et des Services (DRS), considéré comme un "Etat dans l'Etat" avec notamment des pouvoirs de police politique sans cesse dénoncés par l'opposition. Le DRS est remplacé par de nouvelles structures placées directement sous l'autorité de la présidence.

La nouvelle Constitution introduit, par ailleurs, en préambule la préservation de la "politique de paix et de réconciliation nationale" mise en oeuvre par M. Bouteflika pour mettre fin à la "tragédie nationale". Cette expression désigne la guerre civile qui a fait 200'000 morts dans les années 1990.

L'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty International estime que cette disposition empêche d'établir la vérité sur cette sombre page de l'histoire de l'Algérie.

La révision adoptée dimanche rend aussi possible de modifier certains points de la Constitution. Cette disposition vise une éventuelle conquête du pouvoir par une majorité islamiste.

En 1992, l'armée avait annulé un processus électoral après une victoire écrasante du Front islamique (FIS, dissous), qui promettait d'abolir la démocratie et d'instaurer une République islamique. La situation avait alors plongé le pays du Maghreb dans une sanglante guerre civile.

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