Guatemala : élection présidentielle dimanche

03/09/2015
Guatemala : élection présidentielle dimanche

7,5 millions de Guatémaltèques sont appelés aux urnes

Au lendemain de la démission d'Otto Pérez, accusé de corruption et traduit en justice, le Guatemala est présidé, provisoirement, par Alejandro Maldonado. Celui-ci a prêté serment jeudi, dans un climat de liesse populaire à trois jours des élections.

Devant le Parlement, M. Maldonado, jusque-là vice-président, a prêté serment sur la Constitution, avant de revêtir l'écharpe nationale blanche et bleu ciel. Avocat et notaire de 79 ans, il était jusqu'en mai l'un des cinq membres de la Cour constitutionnelle, avant d'être appelé à la vice-présidence pour remplacer Roxana Baldetti.

Cette dernière avait démissionné puis avait été placée en détention provisoire dans le cadre de la même affaire que celle touchant M. Pérez. L'ex-président est accusé par le parquet et une commission de l'ONU contre l'impunité d'avoir dirigé un système de corruption au sein des douanes via lequel des fonctionnaires touchaient des pots-de-vin pour exonérer de taxes certaines importations.

Otto Pérez, au pouvoir depuis 2012, était interrogé depuis jeudi matin par le juge Miguel Angel Galvez, qui a émis mercredi soir un mandat d'arrêt contre lui, précipitant sa démission. En costume sombre et cravate rouge, l'air préoccupé, l'ex-général de 64 ans a assuré sur une radio locale qu'il affronterait avec courage la justice, car il n'a "rien fait de mal".

Durant l'audience, il a paru gêné, baissant les yeux quand l'accusation a diffusé plusieurs enregistrements téléphoniques le mettant en cause.

Le parquet a d'ores et déjà annoncé qu'il demanderait son placement en détention provisoire.

Le procureur Antonio Morales l'a accusé de "faire partie d'une bande criminelle qui opérait depuis mai 2014 avec l'objectif de voler l'Etat". Il a estimé que le dirigeant a pu recevoir 3,7 millions de dollars en pots-de vin, tandis que Mme Baldetti est, elle, soupçonnée d'avoir touché 3,8 millions, notamment via des chèques libellés à son nom.

L'audition du président, deux jours après avoir été privé de son immunité par un vote du Parlement - mesure inédite dans l'histoire du Guatemala -, survient à trois jours seulement du premier tour des élections présidentielle, législatives et municipales de dimanche. M. Pérez n'était pas candidat, la Constitution n'autorisant qu'un seul mandat.

Dès l'annonce, dans la nuit, de sa démission, des dizaines de Guatémaltèques ont accouru devant la Cour suprême, au son de sifflets et scandant "Otto, voleur, tu vas aller à Pavon", l'une des principales prisons du Guatemala.

Malgré les nombreux appels à la démission, Otto Pérez avait répété ces dernières semaines qu'il ne quitterait pas son poste avant la fin de son mandat le 14 janvier prochain. Il a finalement cédé à une mobilisation populaire sans précédent dans ce pays pauvre d'Amérique centrale, avec des manifestations pacifiques organisées chaque semaine depuis avril, quand le scandale a éclaté.

Les manifestants réclament le report du scrutin, souhaitant d'abord une vaste refonte du système politique pour le purger d'une corruption endémique.

Signe d'un renversement de situation, l'humoriste Jimmy Morales, candidat pour un parti de droite et sans expérience politique, est désormais en tête des intentions de vote à la présidentielle, selon un sondage publié jeudi.

A 46 ans, il est crédité de 25% des suffrages. Il dépasse ainsi Manuel Baldizon (droite, 22,9%), le favori jusqu'alors, et la sociale-démocrate Sandra Torres, ex-première dame, avec 18,4%, selon l'enquête effectuée quelques jours avant la démission du président.

Les deux places pour le deuxième tour du 25 octobre devraient donc se jouer entre ces trois candidats sur les 14 inscrits.

Le contexte atypique d'ébullition populaire a poussé le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, à appeler dans un communiqué "tous les Guatémaltèques à faire en sorte que les élections se tiennent dans un environnement pacifique".

Dimanche, quelque 7,5 millions de Guatémaltèques, sur 15,8 millions d'habitants, sont appelés aux urnes pour désigner le nouveau chef de l'Etat, ainsi que 158 députés et 338 maires. Le Guatemala, marqué par 36 ans de guerre civile (1960-1996), reste, au plan mondial, l'un des pays enregistrant le plus de violences liées à la criminalité, avec 6000 morts par an.

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