Le Venezuela plongé dans noir

11/02/2016
Le Venezuela plongé dans noir

Les centres commerciaux ne représentent que 3% du système électrique national

Les Vénézuéliens se rendant dans les centres commerciaux mercredi ont eu la désagréable surprise de les trouver fermés et plongés dans le noir, le gouvernement imposant désormais un rationnement de l'électricité en raison de la sécheresse.

C'est une folie, ce n'est pas la solution, c'est une mesure drastique qui va créer plus de chômage et frapper encore plus l'économie qui est en crise, proteste Nataly Orta, 48 ans, devant le portail métallique du centre Lider, dans l'est de Caracas.

Dans un pays déjà habitué aux graves pénuries de produits basiques comme le café, les couches ou l'huile, l'électricité est depuis mercredi rationnée pour trois mois dans plus de 250 centres commerciaux, qui doivent générer leur propre énergie entre 13h00 et 15h00 puis entre 19h00 et 21h00.

Comme beaucoup ne peuvent produire d'électricité, ils ont préféré fermer pendant ces quatre heures.

Alors que le pays sud-américain souffre d'un taux d'homicides parmi les plus élevés au monde (58 pour 100.000 habitants), les galeries commerciales, où l'on trouve des cinémas, des restaurants et des théâtres, sont très fréquentés par les Vénézuéliens.

Le ministre de l'Energie électrique, Luis Motta, assure qu'il s'agit d'une mesure temporaire pour compenser la dure sécheresse provoquée par le phénomène météorologique El Niño, qui affecte les centrales hydro-électriques.

Le gouvernement prend des mesures concrètes pour minimiser la baisse de niveau des réservoirs d'eau, a-t-il expliqué mercredi.

Mais l'opposition, désormais majoritaire au Parlement, accuse surtout l'exécutif de pas avoir anticipé la situation et de ne pas avoir assez investi dans le réseau électrique.

Pour ne pas être trop pénalisée, la Chambre vénézuélienne des centres commerciaux (Caceveco), qui compte 136 membres, a proposé d'économiser l'électricité cinq heures par jour, au lieu de quatre, en échange d'une fourniture continue et ininterrompue deux fois dans la journée. Leur souhait' Pouvoir ouvrir à midi et fermer à 19h00.

Les coupures vont affecter 2,5 millions de personnes qui se rendent chaque jour dans ces endroits au Venezuela, explique à l'AFP la directrice de Caceveco, Claudia Itriago, qui dit ne pas avoir encore eu de réponse du gouvernement sur sa proposition.

Les centres commerciaux ne représentent que 3% du système électrique national, insiste-t-elle, précisant que beaucoup d'entre eux n'ont pas la capacité de générer leur propre énergie et que ceux qui le peuvent ne couvrent que 40 à 60% de leur demande.

Pour l'économiste Luis Vicente Leon, ordonner aux centres commerciaux d'auto-générer de l'énergie, sans leur donner accès aux devises pour s'équiper, dans un pays soumis au contrôle des changes, est absurde.

Le gouvernement du président socialiste Nicolas Maduro applique en effet un strict contrôle des changes qui provoque une pénurie de devises, limitant fortement les importations de matériel pour les entreprises.

Asdrubal Oliveros, directeur de la société de consultants Ecoanalitica, juge la situation symptomatique du mauvais état de santé du pays, autrefois riche producteur pétrolier, disposant des plus importantes réserves au monde, mais souffrant de la chute des cours du brut.

Cela montre la gravité de la crise structurelle que vit le Venezuela : institutionnelle, économique, sécuritaire et de services, estime-t-il.

José Ramon Pazos, gérant du centre commercial Sambil, situé dans l'est de Caracas, craint que la nouvelle mesure ne pousse certains commerces à se séparer d'une partie de leur personnel car il y a une réduction de leurs horaires.

Cela nous affecte au niveau des ventes, des commissions, se plaint Freddyline Barreto, employée de 26 ans dans une boutique de vêtements. Au lieu de huit heures (par jour), nous allons désormais en travailler quatre.

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