Le 'Boucher des Balkans' condamné à la perpétuité

22/11/2017
Le 'Boucher des Balkans' condamné à la perpétuité

Ratko Mladic

L'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, Ratko Mladic, surnommé le "Boucher des Balkans", a été condamné mercredi à la perpétuité par la justice internationale pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

"Pour avoir commis ces crimes, la chambre condamne M. Ratko Mladic à la prison à vie", a déclaré le juge Alphons Orie en l'absence de l'accusé, évacué de la salle peu avant pour avoir traité ses juges de "menteurs".

"Les crimes commis se classent parmi les plus haineux connus du genre humain", a martelé le magistrat, considérant que les circonstances atténuantes évoquées par la défense, dont sa capacité mentale affaibilie, "avaient peu ou pas de poids" dans le jugement.

Ce jugement ferme un chapitre des conflits en ex-Yougoslavie, une région toujours fracturée après les pires crimes commis en Europe depuis la Seconde guerre mondiale.

Plus de vingt ans après la guerre (1992-1995) qui a fait plus de 100.000 morts et 2,2 millions de déplacés, l'homme de 74 ans a été reconnu coupable de dix chefs d'accusation, dont le génocide de l'enclave de Srebrenica où 8.000 hommes et garçons musulmans ont été tués. Il a été acquitté de l'accusation de génocide dans plusieurs municipalités.

A l'extérieur du tribunal, des femmes qui ont perdu leurs époux, leurs fils, leurs proches, pleuraient et se serraient dans les bras sur une place, où les photos de 300 jeunes hommes, époux et fils, tués par les forces de Ratko Mladic avaient été affichées. 

Mais la présidente de l'association des mères des enclaves de Srebrenica et de Zepa s'est dite "partiellement satisfaite" de ce verdict.

Créé en 1993 pour juger les personnes présumées responsables de crimes de guerre durant les conflits des Balkans, le TPIY a connu mercredi "une étape importante dans (son) histoire et pour la justice internationale" avant de fermer définitivement ses portes le 31 décembre, a déclaré le procureur Serge Brammertz à la sortie de l'audience.

Quelques instants avant sa condamnation, Ratko Mladic a été évacué de la salle d'audience du TPIY à La Haye, après s'être levé et avoir crié aux juges qu'ils mentaient.

Déjà, à son arrivée dans la salle d'audience, le "Boucher des Balkans" avait levé un pouce, souriant aux objectifs des photographes, refusant de saluer les juges.

Le juge Alphons Orie a ordonné qu'il soit évacué après avoir refusé d'accéder à la demande de la défense d'interrompre les procédures en raison de la tension artérielle trop élevée de l'accusé.

"Ils mentent. Vous mentez. Je ne me sens pas bien", a crié Ratko Mladic.

L'accusé a ensuite été installé dans une pièce adjacente pour écouter la suite du jugement alors que la défense demandait que sa tension artérielle soit à nouveau mesurée, après avoir tenté en vain durant des jours d'obtenir un report de ce verdict historique. 

Une attitude qualifiée de "lâche" et "lamentable" à la sortie du tribunal par Kelima Datovic, qui a connu la faim et le froid dans un camp au nord-ouest de la Bosnie en 1992 où elle a été détenue alors qu'elle avait de 28 ans, enceinte et avec sa fille de six ans.

Ratko Mladic, vêtu d'un costume bleu et portant une cravate rouge carmin satinée, "a montré, selon elle, un jeu d'acteur médiocre et pathétique".

Aujourd'hui encore, l'homme divise toujours en Bosnie. Entre héros et boucher.

Considéré à La Haye comme le "cerveau derrière le meurtre de milliers de personnes", il est toujours une "idole" chez lui en Republika Srpska, l'entité des Serbes de Bosnie.

Avec son alter ego politique Radovan Karadzic, Ratko Mladic est considéré comme un "architecte de la politique de nettoyage ethnique" d'une partie de la Bosnie, selon M. Brammertz.

Il a également été reconnu coupable de l'enlèvement d'employés des Nations unies et du siège de Sarajevo, long de 44 mois, au cours desquels 10.000 personnes ont été tuées. Ainsi que d'avoir pris en otage plus de 200 militaires de l'OTAN et de les avoir gardés comme boucliers humains afin d'éviter des attaques aériennes de l'OTAN contre les forces serbes de Bosnie.

"La culpabilité de Mladic est la sienne, et la sienne seulement", a souligné le procureur. "D'autres pensent que Mladic est un héros. Ce jugement démontre que rien ne peut être plus loin de la vérité."

L'accusation avait requis la perpétuité. La défense son acquittement: l'ancien chef militaire lui-même n'a jamais concédé une once de culpabilité.

Inculpé le 25 juillet 1995, Ratko Mladic a été arrêté chez un cousin au terme d'une cavale de seize ans et transféré à La Haye. Son procès aura duré cinq ans. 523 jours.

Commentaires

Loading comments ...

Loading comments ...