Ukraine : restructuration ou défaut de paiement ?

28/08/2015
Ukraine : restructuration ou défaut de paiement ?

Petro Poroshenko, le président ukrainien

L'accord sur la restructuration de la dette publique de l'Ukraine, étranglée financièrement et ravagée par la guerre, s'apparente à un défaut de paiement, ont jugé vendredi les agences de notation Standard & Poor's et Fitch.

L'application de cet accord, obtenu dans la douleur et présenté comme historique par Kiev, risque d'être problématique vu les désaccords persistants autour du remboursement d'un crédit accordé il y a deux ans par Moscou au pouvoir prorusse de l'époque.

Un défaut de paiement de l'Ukraine sur la dette en devises étrangères de son gouvernement constitue pour nous une certitude virtuelle, a jugé S&P dans un communiqué.

Au terme de cinq mois de négociations avec ses principaux créanciers privés, quatre fonds américains, Kiev a annoncé jeudi un accord qui prévoit l'effacement de 20% de cette dette, soit environ 3,6 milliards de dollars, et un allongement de quatre ans de la durée du remboursement de 11,5 milliards de dollars. 

Standard & Poor's explique que les termes de l'accord, annoncé jeudi, correspondent à une situation de défaut de paiement, en vertu de ses critères. D'autre part, le gouvernement pourrait ne pas effectuer des remboursements prévus en attendant l'application de l'accord, ce qui représente aussi un défaut de paiement, a ajouté S&P.

Cette agence a maintenu la note de l'Ukraine à CC alors que sa concurrente Fitch l'a abaissée à C, soit un seul cran au-dessus du niveau correspondant à un défaut de paiement.

La dette ukrainienne sera classée en défaut restreint lorsque l'accord sera appliqué, a prévenu Fitch dans un communiqué, expliquant qu'il entraînera des pertes importantes pour les créanciers.

Une fois achevée, la restructuration doit permettre à Kiev d'alléger ses dépenses budgétaires de 15,3 milliards de dollars sur quatre ans. Un tel effort est demandé dans le cadre du plan d'aide de 40 milliards de dollars accordé à l'Ukraine par ses alliés occidentaux et par le Fonds monétaire international (FMI).

Celui-ci, tout comme le gouvernement ukrainien, estime qu'il permettra à ce pays de renouer l'an prochain avec la croissance.

Kiev a déjà prévenu qu'il comptait bien obtenir un tel effort concernant cette fois le crédit de trois milliards de dollars octroyé en 2013 au président prorusse de l'époque Viktor Ianoukovitch, renversé début 2014 par un mouvement de protestation proeuropéen, ce que Moscou refuse.

Ce désaccord complique la situation, a souligné Standard & Poor's.

Nous exigeons de l'Ukraine qu'elle remplisse ses obligations pour les montants qui ont été fournis, a répété jeudi le ministre russe des Finances Anton Silouanov. Nous allons exiger le remboursement de ces fonds en décembre, avec les intérêts prévus, a-t-il insisté à la télévision publique russe.

Le Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk lui a sèchement répondu vendredi, insistant qu'il n'y aurait pas d'autre proposition à la Russie que l'accord de jeudi.

Je peux leur (aux dirigeants russes) donner un conseil : ceux qui ont contracté ce crédit ont obtenu l'asile en Russie. Que (les Russes) appellent ces bandits auxquels ils ont accordé l'asile et qu'ils leur prennent cet argent. Ou qu'ils nous renvoient (ces personnes) et nous nous occuperons d'elles avec plaisir, a-t-il déclaré dans une claire allusion à l'ex-président Ianoukovitch.

Jugé très corrompu, ce dernier est visé par une série d'enquêtes judiciaires en Ukraine, d'où il a fui avant se destitution par le Parlement. 

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