Ebola : la peur joue un rôle important dans la crise

03/09/2014
Ebola : la peur joue un rôle important dans la crise

Un employé de l’OMS vérifie la température d’une voyageuse à l’aéroport de Lugin, à Freetown © OMS

 A l'occasion d'une réunion d'information pour les Etats membres sur la réponse de l'ONU à l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest, le Vice-Secrétaire général des Nations Unies, Jan Eliasson, a mis en garde contre les informations erronées circulant sur le virus.

« La peur joue un rôle important dans la crise. J'encourage les États membres, les entreprises et les particuliers, à prendre des décisions fondées sur des preuves scientifiques et non sur la peur », a insisté M. Eliasson à l'ouverture de cette réunion au siège des Nations Unies à New York.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS),  le nombre de cas d'Ebola en Guinée, au Libéria, au Nigéria et en Sierra Leone s'élève désormais à 3.069, avec plus de 1.552 décès, ce qui en fait la plus importante épidémie d'Ebola jamais enregistrée.

D'autres hauts responsables des Nations Unies participaient également à cette réunion d'information, notamment la Directrice générale de l'OMS, le Dr Margaret Chan, le Coordonnateur principal du système des Nations Unies pour Ebola, le Dr David Nabarro, le Directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), Anthony Lake, et le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux opérations de maintien de la paix, Hervé Ladsous.

« L'épidémie est plus qu'une crise sanitaire », a déclaré M. Eliasson, soulignant que les systèmes de santé dans les pays touchés étaient dépassés par l'ampleur et la complexité du problème. « En ce qui concerne l'ONU, c'est l'un des problèmes sanitaires les plus graves que nous ayons jamais rencontrés. La réalité sur le terrain n'est pas différente de celles causées par des calamités naturelles et des conflits de grande ampleur - et à certains égards elle est encore plus difficile ».

Les gouvernements, les organisations multilatérales et régionales, les agences des Nations Unies, les organisations non-gouvernementales et d'autres partenaires se sont mobilisés face à l'ampleur de l'épidémie. Au niveau des pays, une énorme quantité de travail a déjà été faite par les missions de l'ONU, les opérations de maintien de la paix et les équipes des Nations Unies. Le Secrétaire général de l'ONU a mis en place un mécanisme de coordination sous l'autorité de Dr Nabarro.

« Mais nous ne pouvons pas agir seuls. Nous avons besoin de stratégies efficaces, de partenariats et de moyens. Il ne peut y avoir de maillons faibles dans cette chaîne opérationnelle. Nous devons aussi penser en termes non conventionnelles et faire preuve de rapidité et de flexibilité dans la définition et l'exécution de nos stratégies », a déclaré M. Eliasson.

Les perturbations de la commercialisation et des échanges de produits alimentaires dans les trois pays d'Afrique de l'Ouest les plus touchés par l'Ebola ont fait grimper en flèche les prix des denrées, tandis que les pénuries de main-d'œuvre risquent fortement de compromettre les prochaines récoltes, a mis en garde mardi l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

En Guinée, au Libéria et en Sierra Leone, des zones de quarantaine et des restrictions aux déplacements de personnes visant à enrayer la propagation du virus ont sérieusement limité le mouvement et la commercialisation des aliments. Cette situation a engendré des achats dictés par la panique, des pénuries alimentaires et de fortes flambées des prix pour certaines denrées, en particulier dans les centres urbains, d'après une alerte spéciale publiée par le Système mondial d'information et d'alerte rapide de la FAO (SMIAR).

Parallèlement, la campagne de la récolte principale de deux cultures essentielles (riz et maïs) approche à grands pas. Les pénuries de main-d'œuvre agricole dues aux restrictions de mouvements et aux migrations vers d'autres zones auront de fortes répercussions sur la production agricole, mettant en péril la sécurité alimentaire de grands nombres de personnes, avertit l'alerte.

Les pluies généralement adéquates tombées durant la campagne agricole de 2014 avaient laissé présager des récoltes favorables dans les principaux pays touchés par l'Ebola. Mais les zones les plus touchées par la maladie étant parmi les plus productives de la Sierra Leone et du Liberia, la production alimentaire risque d'être fortement réduite.

De même, la production de cultures de rente comme l'huile de palme, le cacao et le caoutchouc, dont dépendent pour vivre de nombreuses familles, risque d'être sérieusement compromise.

« L'accès à la nourriture est devenu un grave problème pour beaucoup d'habitants des trois pays concernés et leurs voisins », a déclaré Bukar Tijani, Représentant régional de la FAO pour l'Afrique. « Avec la récolte principale désormais à risque et les échanges et mouvements de marchandises fortement restreints, l'insécurité alimentaire est appelée à s'intensifier au cours des semaines et des mois à venir. La situation aura des impacts à long terme sur les moyens d'existence des agriculteurs et les économies rurales », a-t-il ajouté.

La Guinée, la Sierra Leone et le Liberia sont tous des importateurs nets de céréales, ce dernier étant le plus dépendant des approvisionnements externes. La fermeture de certains postes frontaliers et l'isolement des zones de frontières entre les trois pays – ainsi que la diminution des échanges dans les ports, principale voie d'entrée des grosses importations commerciales – entraînent une contraction des disponibilités et une hausse importante des prix alimentaires.

A Monrovia, capitale du Libéria, certains aliments ont subi un fort renchérissement, comme le manioc qui a vu leur prix grimper en flèche de 150% durant les premières semaines d'août au marché Red Light.

« Même avant l'épidémie d'Ebola, les ménages de certaines zones touchées consacraient jusqu'à 80 pour cent de leurs revenus à la nourriture », a indiqué Vincent Martin, Chef du Réseau de résilience de la FAO basé à Dakar, qui coordonne l'intervention de l'Organisation. « Avec ces dernières flambées des prix, ils ne peuvent plus du tout se permettre d'acheter d'aliments. Cette situation pourrait avoir des retombées sociales susceptibles d'entraîner de fortes répercussions sur les mesures de confinement de la maladie. »

En outre, la dévaluation des monnaies nationales de la Sierra Leone et du Liberia ces derniers mois devrait exercer une nouvelle pression à la hausse sur les prix des importations alimentaires.

Pour répondre aux besoins alimentaires immédiats, le Programme alimentaire mondial (PAM) a lancé une opération d'urgence à l'échelle régionale prévoyant quelque 65.000 tonnes de nourriture en faveur de 1,3 million de personnes dans les centres de santé et les zones de quarantaine.

« Nous multiplions nos efforts pour apporter une aide alimentaire à toutes les personnes dans le besoin et pour fournir un soutien logistique aux autres agences de l'ONU et aux organisations non gouvernementales qui travaillent pour contenir le virus et répondre aux besoins des personnes touchées », a déclaré Denise Brown, directrice régionale du PAM pour l'Afrique de l'Ouest. « Contenir le virus nécessite une prise en charge globale, y compris alimentaire ».

Le Service aérien humanitaire des Nations Unies (UNHAS), qui est géré par le PAM, a déployé un avion de 19 places depuis le 16 août. Il assure la connexion entre Conakry, Freetown et Monrovia afin de permettre un accès vital au personnel humanitaire et de transporter des équipements d'urgence. Un hélicoptère de l'UNHAS, actuellement à Monrovia, décollera pour les zones touchées dans les prochains jours.

Le PAM a un besoin urgent de 70 millions de dollars pour une opération régionale d'urgence jusqu'à novembre. Les vols de l'UNHAS, qui ont besoin de 7,3 millions de dollars d'ici le 13 octobre, ne sont financés qu'à hauteur de 38%. Le PAM a aussi lancé une opération logistique dont le coût s'élève à 7,5 millions de dollars.

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