12 morts en Turquie

07/10/2014
12 morts en Turquie

La police turque près de la frontière avec la Syrie

Les combats qui opposent jihadistes et combattants kurdes pour le contrôle de la ville syrienne de Kobané ont suscité mardi dans toute la Turquie de violentes manifestations contre le gouvernement islamo-conservateur turc qui ont fait au moins douze morts.

Selon le dernier bilan compilé en soirée par les médias turcs, cinq personnes sont mortes à Diyarbakir, trois à Mardin, deux à Siirt, une à Batman et une à Mus, toutes des villes du sud-est du pays à majorité kurde, pour la plupart lors d'affrontements entre militants kurdes et adversaires politiques.

De très nombreux blessés et d'importants dégâts matériels ont également été recensés, notamment des bâtiments publics et des véhicules incendiés et des banques ou des magasins pillés.

Mobilisées à l'appel du principal parti politique kurde de Turquie, des milliers de personnes sont descendues dans les rues de tout le pays pour dénoncer le refus d'Ankara de voler militairement au secours de Kobané (Aïn al-Arab en langue arabe), en passe de tomber entre les mains des forces du groupe État islamique (EI).

Dans la plupart de ces villes, la contestation a rapidement dégénéré.

Ainsi à Diyarbakir, la capitale kurde du pays, les cinq victimes recensées ont été tuées par armes à feu lors d'une série d'attaques qui ont mis aux prises des militants kurdes à des membres de mouvements islamistes.

A Mus, un homme de 25 ans a ainsi été tué en recevant en pleine tête une cartouche de grenade lacrymogène tirée par la police.

Dans plusieurs districts d'Istanbul, notamment Gazi et Kadiköy, de violentes échauffourées ont par ailleurs opposé à partir du début de l'après-midi les forces de l'ordre aux manifestants prokurdes.

La police antiémeute est également intervenue avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour disperser les protestataires dans la capitale Ankara, dans la station balnéaire d'Antalya ou les villes de Mersin et d'Adana (sud).

Les autorités locales ont par ailleurs décrété le couvre-feu à Diyarbakir et dans plusieurs districts de Mardin et de Van (est), où l'armée a pris position.

Le ministre de l'Intérieur Efkan Ala a lancé mardi soir un appel au calme. La violence n'est pas une solution (...) ce n'est pas acceptable, a-t-il déclaré devant la presse, ces réactions irrationnelles doivent cesser immédiatement (...) sinon elles auront des conséquences imprévisibles.

Dès lundi soir, le Parti républicain populaire (HDP) avait appelé les Kurdes du pays --plus de 15 millions de personnes soit 20% de la population turque-- à se mobiliser, pour protester contre l'entrée des jihadistes dans Kobané, la troisième ville kurde de Syrie, après plusieurs jours d'intenses bombardements.

Les combats y ont fait rage toute la journée de mardi entre forces kurdes et combattants de l'EI, dont les positions ont été visées par des frappes aériennes de la coalition dirigée par les Etats-Unis. 

Malgré le feu vert du Parlement à une opération militaire contre l'EI, le pouvoir islamo-conservateur turc s'est jusque-là refusé à intervenir, provoquant la colère des populations kurdes.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a indiqué mardi que Kobané était sur le point de tomber et a plaidé, en visitant un camp de réfugiés syriens à Gaziantep (sud), pour une opération militaire terrestre contre les jihadistes.

Les Kurdes ont prévenu que la chute de Kobané provoquerait la fin des pourparlers de paix engagés il y a deux ans par Ankara et les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) pour mettre un terme à un conflit qui a fait 40.000 morts depuis 1984.

Dans un message relayé par son frère, le chef emprisonné du PKK Abdullah Öcalan a laissé au gouvernement jusqu'à la mi-octobre pour faire un geste en faveur de la paix.

Ils (le pouvoir) parlent de résolution et de négociation mais il ne se passe rien, a dit M. Öcalan, c'est une situation artificielle qui ne pourra pas durer.

L'Union des communautés du Kurdistan (KCK), considérée comme la branche urbaine du PKK, a de son côté appelé les millions de Kurdes à descendre dans la rue.

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