L'UA n'enverra pas de soldats au Burundi

31/01/2016
L'UA n'enverra pas de soldats au Burundi

Les participants en séance plénière dimanche à Addis Abeba

L’Union africaine a renoncé dimanche à envoyer dans l’immédiat une force de maintien de la paix au Burundi, en proie à une crise politique meurtrière, face à la réticence de plusieurs chefs d’Etat africains et à l’opposition frontale de Bujumbura.

Désigné samedi nouveau président en exercice de l’organisation continentale, le président tchadien Idriss Déby avait égratigné son auditoire: «Nous nous réunissons trop souvent, nous parlons toujours trop, nous écrivons toujours beaucoup, mais nous n’agissons pas assez et parfois pas du tout».

Sur le Burundi, une des priorités de ce 26e sommet de l’UA clos dimanche, les chefs d’Etat ont choisi de privilégier la discussion avec Bujumbura et de surseoir à l’envoi d’une «mission de stabilisation» de 5.000 hommes dont le principe avait pourtant été acté mi-décembre par l’UA.

Cette force devait permettre d’enrayer le cycle des violences au Burundi faisant craindre des massacres à grande échelle, voire un génocide, dans ce petit pays d’Afrique des Grands Lacs marqué par une guerre civile meurtrière (300.000 morts) entre 1993 et 2006.

Les chefs d’Etat, soucieux pour certains de ne pas créer un précédent, à savoir l’envoi d’une force militaire dans un pays sans son aval, sont donc convenus de dépêcher une «délégation de très haut niveau» pour en discuter avec le gouvernement burundais.

On ignore la composition de cette délégation.

«Si le Burundi l’accepte, ce sera une force pour le désarmement des milices, la protection des civils en coopération avec les forces de police locales, la facilitation du travail des observateurs des droits de l’Homme», a plaidé le Commissaire de l’UA à la Paix et la Sécurité Smaïl Chergui.

«Il n’y a pas de volonté ni d’occuper ni d’agresser», a tenté de rassurer M. Chergui, ajoutant que la mission de l’UA visait à «donner un peu de quiétude à tout le monde».

Mais le ministre des Affaires étrangères du Burundi, Alain Aimé Nyamitwe, qui s’est dit satisfait de la décision de l’UA, a quelque peu douché les espoirs.

«Je n’ai pas l’impression que les chefs d’État et de gouvernement feront le déplacement jusqu’à Bujumbura, juste pour avoir un avis sur une question. Tout le monde est au courant de la position du Burundi», a-t-il affirmé à Addis Abeba.

Le président Nkurunziza, absent au sommet, avait promis de «combattre» la Mission africaine de prévention et de protection au Burundi (Maprobu) comme «une force d’invasion et d’occupation».

Plus de 400 personnes ont été tuées depuis le début de la crise au Burundi, qui a poussé 230.000 personnes à l’exil. La capitale est désormais le théâtre de nombreuses exécutions extrajudiciaires, d’accrochages nocturnes réguliers, tandis que les auteurs d’un coup d’Etat avorté en mai ont promis de renverser le gouvernement par les armes si nécessaire.

La montée en puissance des violences après la réélection de M. Nkurunziza à un 3e mandat en juillet, l’apparition d’embryons de mouvements rebelles et la crainte des répercussions de la crise dans une région des Grands Lacs très instable avaient conduit l’UA, et notamment la présidente de la commission Nkosazana Dlamini-Zuma, à envisager des mesures plus fermes.

En vain pour le moment, et en dépit du soutien du secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon qui appelait samedi l’UA à «l’engagement le plus sérieux et le plus urgent».

L’UA s’est aussi penchée sur les autres défis sécuritaires du continent: la Libye, la lutte contre le terrorisme au Sahel et dans la région du lac Tchad, et la difficile mise en œuvre d’un accord de paix au Soudan du Sud.

Sur la Libye, l’UA va relancer un groupe de cinq chefs d’Etat pour aider à la formation d’un gouvernement d’union nationale et tenter ainsi de contrer la progression du groupe Etat islamique dans ce pays en proie en chaos depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011.

«Nous ne croyons pas pour le moment à une solution militaire pour la crise libyenne. Cela compliquerait davantage la donne», a déclaré M. Chergui.

Le président Faure Gnassingbé qui assistait au sommet a quitté la capitale éthiopienne dans l'après-midi.

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