Grande Bretagne : Corbyn ne fait pas l'unanimité

23/09/2018
Grande Bretagne : Corbyn ne fait pas l'unanimité

Jeremy Corbyn

Le leader des travaillistes britanniques, Jeremy Corbyn, s'est exprimé dimanche contre un second référendum sur le Brexit, mais a promis qu'il se conformerait à l'avis de la majorité de son parti, réuni en congrès à Liverpool.

"Je n'appelle pas à un nouveau référendum", a affirmé le chef de l'opposition dans un entretien avec le Sunday Mirror. "La meilleure manière de régler cette situation est de convoquer des élections législatives", a-t-il ajouté, tout en précisant qu'il respecterait "ce qui sera décidé au cours de ce congrès".

Il a annoncé qu'un vote sur le sujet serait organisé avant la fin de cette réunion, qui se déroule jusqu'à mercredi, mais a souligné que la question qui serait soumise aux militants n'avait pas encore été définie.

Un sondage YouGov pour The Observer dont les résultats ont été publiés dimanche montre que 86% des adhérents du Labour sont favorables à l'organisation d'un référendum sur le résultat final des négociations du Brexit, tandis que 8% y sont opposés.

Une manifestation en faveur de l'organisation d'un "vote populaire" est d'ailleurs prévue pour dimanche à Liverpool afin de coïncider avec l'ouverture de la grande messe du parti, accentuant la pression sur le patron des travaillistes.

"Le Brexit va être le grand sujet du congrès", a affirmé à l'AFP Steven Fielding, un professeur d'histoire politique de l'université de Nottingham, et un sujet "des plus délicats".

Plusieurs députés et certaines grandes figures du parti, dont le maire de Londres Sadiq Khan, ont déjà pris position en faveur d'une nouvelle consultation, pour laquelle milite également la confédération syndicale TUC. 

Jeremy Corbyn avait quant à lui évité jusque-là ce sujet sensible. Il a rappelé dimanche sur la BBC que 40% des électeurs du Labour avaient voté en faveur du Brexit au référendum de juin 2016.

Aux dernières élections législatives, le leader travailliste avait axé sa campagne sur la politique intérieure, notamment les questions économiques et sociales, une tactique qui s'était révélée payante et qu'il a poursuivie par la suite. 

Divisé sur le Brexit, le Labour s'est aussi déchiré ces derniers mois sur la question de l'antisémitisme. La crise a été alimentée par la réticence du parti à adopter la définition complète de l'antisémitisme de l'International Holocaust Remembrance Alliance, de crainte que cela ne l'empêche de critiquer la politique israélienne. 

Jeremy Corbyn a reconnu en août que sa formation avait un "réel problème" d'antisémitisme et assuré que sa priorité était de "rétablir la confiance" avec la communauté juive. Le parti a finalement adopté la définition dans son ensemble et espère avoir ainsi tourné la page sur cet épisode. 

Mais pour Anand Menon, un professeur de politique européenne du King's College de Londres, "s'ils veulent que la conférence réussisse, ils vont devoir s'attaquer à la question de l'antisémitisme et ne pas prétendre qu'ils l'ont déjà réglée".

Si cette crise ne semble pas avoir affecté la popularité du Labour, toujours au coude à coude avec le Parti conservateur dans les sondages, "cela a amené certains députés travaillistes à remettre en question sa direction", souligne Anand Menon. 

"Il y a toujours beaucoup de ressentiment, d'amertume qui ne se dissiperont pas facilement", ajoute Steven Fielding.

Jeremy Corbyn a donc plus que jamais pour mission de rassembler ses troupes, d'autant qu'un projet au sein du parti risque de fâcher une partie des députés travaillistes. Il prévoit que les parlementaires souhaitant se représenter aux élections ne soient pas automatiquement reconduits et se soumettent au vote des militants. 

Une procédure soutenue par Momentum, le puissant groupe de militants partisans de M. Corbyn, qui vante son caractère démocratique et espère un renouvellement générationnel. Les opposants au projet craignent, quant à eux, de possibles purges.

Le risque est que des députés évincés "décident de former leur propre parti", relève Steven Fielding. "Dans ce cas, cela pourrait empêcher le Labour de gagner les prochaines élections et Jeremy Corbyn d'accéder au pouvoir. C'est donc une question très importante."

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