Le président français a du mal à convaincre

11/12/2018
Le président français a du mal à convaincre

Les mesures annoncées par Emmanuel Macron sont-elles suffisantes ?

Après les annonces, place au service après-vente: le Premier ministre français a défendu mardi devant l'Assemblée les mesures déclinées la veille par Emmanuel Macron pour montrer qu'elles répondent aux demandes des "gilets jaunes", toujours nombreux à se déclarer déçus et à vouloir poursuivre leur mobilisation.

"Le président de la République a entendu la colère qui s'exprime et a apporté les réponses qui s'imposaient", a assuré Édouard Philippe en détaillant les annonces du chef de l'État la veille, des mesures "massives" pour que "le travail paie", financées par l'Etat, a-t-il plaidé. 

Il est revenu en particulier sur l'annonce phare de la veille, une augmentation de 100 euros des salaires au niveau du Smic via une prime d'activité majorée. "Quand a-t-on augmenté le Smic d'un niveau de 100 euros ? Avez-vous un exemple récent ? Nous voulons aller beaucoup plus loin, beaucoup plus fort et beaucoup plus vite", a-t-il lancé, assurant que cette mesure concernerait tous ceux payés au salaire minimum. 

Il a aussi rappelé l'exemption de la hausse de la CSG pour les retraités gagnant moins de 2.000 euros par mois, qui concernera désormais selon lui 70% des retraités, les heures supplémentaires défiscalisées et l'appel aux entreprises à verser une prime de fin d'année sans impôt ni charges.

Le Premier ministre a aussi dénoncé avec force les menaces et dégradations visant des élus, notamment des parlementaires LREM, en marge du mouvement des "gilets jaunes". "C'est gravissime", a-t-il averti, en appelant à ne jamais s'habituer à ce "travers inquiétant" du débat public.

Pour réconforter des élus "très éprouvés" par ces agressions, Emmanuel Macron reçoit d'ailleurs mardi soir à l'Elysée tous les parlementaires LREM et MoDem. 

Preuve des immenses attentes de l'opinion envers le chef de l'Etat après un mois de mobilisation des "gilets jaunes": l'audience spectaculaire de l'allocution présidentielle, suivie par plus de 23 millions de Français, toutes chaines confondues, un record absolu pour une annonce officielle. 

Les premiers sondages montrent que le soutien des Français au mouvement, qui réunissait jusqu'ici plus des trois quarts de la population, a nettement reculé mais reste important, autour de 50% des sondés. 

Les mesures annoncées lundi soir en faveur du pouvoir d'achat, chiffrées à environ 10 milliards d'euros, n'ont cependant pas été jugées suffisantes par de nombreux protestataires, qui ont annoncé leur détermination à poursuivre les blocages et appelé à un "acte V" de la mobilisation samedi dans toute la France.

Les mesures annoncées risquent en tout cas de creuser nettement le déficit, qui selon Gérard Darmanin pourrait grimper à 2,5% hors coût de la transformation du CICE en baisse de charges (0,9%), soit 3,4% au lieu des 2,8% visés jusqu'ici. 

"L'impact des annonces faites par le président" Macron sur le déficit français sera suivi "avec attention", a déjà noté le Commissaire européen à l'Economie Pierre Moscovici.

Alors que beaucoup de "gilets jaunes" reprochent à Emmanuel Macron de ne pas avoir mis à contribution les plus riches ou les grandes entreprises, le chef de l'Etat recevait mardi les dirigeants des grandes banques, avant les grandes entreprises mercredi, pour leur demander de "participer à l'effort collectif".

Plusieurs organisations patronales ont aussi salué mardi les annonces du président, qui sont "de nature à répondre aux attentes exprimées sans pénaliser la compétitivité des entreprises" selon le Medef.

Chez Les Républicains, le président des députés LR Christian Jacob a lui estimé que les annonces d'Emmanuel Macron constituaient "un désaveu cinglant pour son gouvernement", mais approuvé la défiscalisation des heures supplémentaires. 

Le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon a apporté son soutien à un "acte V" de la mobilisation samedi. Plus prudente, Marine Le Pen a demandé aux "gilets jaunes" "d'analyser en conscience les propositions du président pour déterminer s'il est allé assez loin". 

Les députés socialistes, Insoumis et communistes comptaient déposer mardi une motion de censure qui sera débattue jeudi.

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