'Accord pratiquement impossible'

08/10/2019
'Accord pratiquement impossible'

Boris Johnson

Les négociations sur le Brexit entre Londres et les Européens semblaient mardi au bord de la rupture, à un peu plus de trois semaines de la date prévue, Bruxelles accusant le Premier ministre britannique Boris Johnson de jouer avec "l'avenir de l'Europe".

Les Européens ont donné jusqu'à la fin de la semaine au gouvernement britannique pour leur présenter un compromis acceptable et arriver à une séparation à l'amiable au 31 octobre.

Sans attendre cette échéance, les deux parties ne cachent pas leur pessimisme, semblant préparer les esprits à une sortie sans accord, voire au report voulu par le Parlement britannique. Après un entretien téléphonique mardi entre M. Johnson et Angela Merkel, une source à Downing Street a jugé un accord "pratiquement impossible".

Selon cette source, la chancelière allemande a prévenu le chef du gouvernement conservateur qu'un accord était "extrêmement improbable" faute de nouvelles propositions de Londres prévoyant un maintien de l'Irlande du Nord britannique dans l'union douanière européenne. Ce que le Royaume-Uni refuse.

L'enjeu est d'éviter le rétablissement d'une frontière physique entre les deux Irlande et de préserver la paix sur l'île, qui a connu plusieurs décennies de violences.

"Les efforts continuent pour trouver un accord", a tweeté le négociateur en chef de l'Union européenne Michel Barnier, après avoir rencontré le chef de la diplomatie irlandaise Simon Coveney. Ce dernier a dit croire en la volonté de Boris Johnson de trouver une issue.

 Le président du Conseil européen, le Polonais Donald Tusk, a accusé sur Twitter Boris Johnson de jouer avec "l'avenir de l'Europe et du Royaume-Uni" en se prêtant à un "stupide jeu de reproches" sur les responsabilités d'un échec des négociations.

Refusant lui aussi ce "blame game", le président de la Commission Jean-Claude Juncker a estimé dans une interview aux quotidiens français les Echos et l'Opinion que "le péché originel se trouve sur les îles et non sur le continent". "Un Brexit sans accord entraînerait un affaissement du Royaume-Uni et un net affaiblissement des ressorts de croissance sur le continent", a-t-il ajouté, estimant que "perdre un Etat-membre pour des raisons de stricte politique intérieure (...) reste une véritable tragédie".

De difficiles négociations se sont poursuivies mardi à Bruxelles sur la base d'un projet présenté mercredi dernier par Boris Johnson pour tenter de mettre fin au casse-tête de la frontière irlandaise.

Le plan britannique a été rejeté en l'état par les Européens. Ils refusent le droit de veto que Londres souhaite accorder à l'assemblée et à l'exécutif nord-irlandais et les propositions pour les contrôles douaniers entre les deux Irlande.

Après un entretien téléphonique mardi, Boris Johnson et son homologue irlandais Leo Varadkar "espèrent se rencontrer cette semaine", selon Downing street.

Reçu par Boris Johnson en fin de journée, le président du Parlement européen, l'Italien David Sassoli, a déploré qu'il n'y ait eu "aucun progrès".

"Ces discussions atteignent un point critique. Le Royaume-Uni a fait un grand pas en avant et maintenant nous devons voir quelque chose bouger du côté de l'UE", a commenté un porte-parole britannique.

 Londres avait tenté lundi d'apporter des clarifications. Mais selon une source européenne, "rien n'a bougé". "A ce rythme-là, on voit mal comment on pourrait être prêt pour le Conseil" européen des 17 et 18 octobre, présenté comme celui de la dernière chance, a dit une autre source.

Arrivé au pouvoir fin juillet, Boris Johnson s'est engagé à sortir le Royaume-Uni de l'UE à tout prix le 31 octobre, malgré une loi le contraignant à demander un report si aucun accord n'est trouvé d'ici au 19 octobre.

Signe que l'hypothèse d'un "no deal" se renforce, le ministre irlandais des Finances Paschal Donohoe a annoncé mardi un plan de soutien massif à l'économie de son pays, s'élevant à 1,2 milliard d'euros, afin d'en atténuer l'impact.

Le gouvernement britannique a également assuré être "préparé" à un Brexit sans accord.

Mais le centre de réflexion Institute for Fiscal Studies (IFS) a dressé un tableau noir, avec un plongeon de l'activité économique et une explosion du déficit public du Royaume-Uni.

Selon une source de Downing Street citée par le magazine The Spectator, M. Johnson table sur un échec des négociations avec l'UE et fera "toutes sortes de choses" pour éviter un report. Si finalement la sortie était repoussée une troisième fois le temps d'organiser des élections, Boris Johnson ferait campagne pour un "no deal" en cas de législatives anticipées.

Le gouvernement a décidé de suspendre le Parlement à la fin des débats mardi soir, comme il est de coutume, pour pouvoir présenter son programme de politique nationale lundi prochain.

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