Brexit : prochaine ouverture des négociations

14/03/2017
Brexit : prochaine ouverture des négociations

Theresa May

La Première ministre britannique Theresa May s'apprête à ouvrir les négociations du Brexit forte d'une victoire face à une rébellion parlementaire, qui n'occulte cependant pas la difficulté de la tâche qui l'attend avec les responsables européens.

La décision du gouvernement écossais d'entreprendre d'organiser un nouveau référendum d'indépendance et les signes avant-coureurs que le vote pour sortir de l'Union européenne commence à impacter négativement l'économie britannique montrent que son chemin sera semé d'embûches, estiment les analystes.  

A cela s'ajoute le fait que Bruxelles entend exiger une note de divorce salée - jusqu'à 60 milliards d'euros -, selon les estimations. 

"Les choses pourraient rapidement devenir délicates", estime Tim Bale, professeur de sciences politiques à l'université Queen Mary de Londres. 

Sur le plan intérieur, Mme May a jusqu'ici manoeuvré adroitement. 

Le Parlement l'a autorisée lundi soir à déclencher le Brexit, passant outre la volonté initiale des élus de bloquer le texte s'il ne leur donnait pas le droit de regard final sur le futur accord avec Bruxelles. Malgré les menaces agitées, aucun député de son Parti conservateur n'a voté contre le texte, bien qu'une poignée d'entre eux se soient abstenus. 

La lune de miel avec sa majorité se conjugue à la faiblesse de l'opposition, à une relative stabilité économique et à une presse très eurosceptique pour offrir à Mme May un boulevard.  

Si elle a fait campagne pour rester dans l'UE avant le référendum du 23 juin 2016, la dirigeante britannique a promis une coupure nette avec Bruxelles, soit un Brexit "dur" synonyme de sortie du marché unique et de la limitation de l'immigration européenne. 

Ce qui lui a permis de s'attirer les faveurs de la droite de son parti, très eurosceptique, tandis que les pro-UE préfèrent garder le silence de crainte d'être accusés d'aller à l'encontre de la volonté des Britanniques qui ont voté à 52% pour le Brexit. 

"Les historiens vont sûrement trouver étrange qu'alors qu'il n'y a pas de majorité dans le pays et pas de majorité au parlement pour un Brexit +dur+ nous nous acheminions vers un Brexit +dur+", déclare à l'AFP Charles Grant, directeur du centre de réflexion Centre for European Reform. 

Selon lui, la réponse se trouve dans le fait "qu'il n'y a pas d'opposition et que le Parti conservateur, bien que largement modéré, a très peur de la presse eurosceptique". 

Les Tories ont près de 20 points d'avance dans les sondages sur le Parti travailliste, principal parti d'opposition du pays, qui est très divisé depuis l'élection à sa tête de Jeremy Corbyn et qui peine à délivrer un message clair sur le Brexit. 

La majorité dont dispose Mme May à la chambre des Communes est cependant étroite et certains ténors du parti l'ont appelée à organiser des élections générales anticipées pour asseoir sa domination. 

Avec une multiplication des votes en perspective pour cause de sortie des Traités européens, "le gouvernement pourrait faire face à de nombreux scrutins serrés", a déclaré l'ancien ministre William Hague. 

D'autant que "l'unité du parti Tory est plus fragile qu'il n'y paraît", estime M. Bale. 

A l'extérieur, Mme May va devoir faire face à des dirigeants européens confrontés à la montée du nationalisme dans leur pays et qui craignent que le Brexit ne fasse des émules. 

Ces dernières semaines, elle a tenté d'adoucir le ton, soulignant qu'elle ne voulait pas que le Brexit cause du tort au projet européen. Quant à sa volonté de sortir du marché unique, elle a été accueillie de manière plutôt positive de l'autre côté de la Manche, où on a salué l'apport de clarté sur ses objectifs. 

Elle s'est toutefois dite prête à sortir de l'UE sans accord si elle n'obtient pas ce qu'elle réclame, une perspective que le monde des affaires craint plus que tout. 

La solidité de l'économie britannique, qui est loin d'avoir sombré dans la récession comme le présidaient certains avant le vote pour le Brexit, a aidé Mme May jusqu'ici. 

Mais l'incertitude est de mise pour l'avenir alors que certains indicateurs comme la consommation ou la production industrielle commencent à fléchir. 

"Tout se passe bien jusqu'ici. Mais nous en sommes au début. Si l'économie tourne mal, elle pourrait s'inquiéter", estime M. Grant. 

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