Cuba : Hollande fait sa révolution

La France et Cuba ont signé lundi à Paris un accord portant sur la conversion d'une partie des arriérés de la dette cubaine. Ceux-ci seront transformés en un fonds doté de 212 millions d'euros.

Ce fonds "servira à accélérer les projets franco-cubains à Cuba en finançant une part des coûts locaux de ces projets", a précisé la présidence français dans un communiqué. Les projets appelés à être soutenus seront sélectionnés par l'Agence française de développement, qui va ouvrir prochainement une antenne à Cuba.

L'accord a été passé à l'occasion de la visite à Paris du président cubain Raul Castro. Il a été signé par le ministre français des finances Michel Sapin et le vice-président du conseil des ministres cubain, Ricardo Cabrisas.

Cuba et le Club de Paris avaient annoncé le 12 décembre un accord sur la restructuration de 16 milliards de dollars de dettes pour lesquelles La Havane avait fait défaut en 1986. Cette instance regroupe des pays créanciers, dont la Suisse.

François Hollande a accueilli Raul Castro par une chaleureuse accolade sur le tapis rouge à l'Elysée, où la visite du leader cubain signe la normalisation des relations entre Cuba et l'Europe. Les deux dirigeants se sont entretenus pendant près d'une heure avant la signature prévue d'une douzaine d'accords et un dîner d'Etat.

Lors d'une déclaration à la presse, le président français a appelé son homologue américain Barack Obama à aller "jusqu'au bout" et à "effacer" l'embargo commercial américain qui frappe l'île. Une mesure qu'il a qualifiée de "vestige de la guerre froide".

Cuba a entamé un rapprochement spectaculaire fin 2014 avec son vieil ennemi américain. Ce dialogue a été concrétisé par la réouverture d'ambassades dans les deux pays.

Depuis avril 2014, La Havane discute aussi avec l'Union européenne afin d'instaurer un "cadre de dialogue politique et de coopération" censé tourner la page de vieilles querelles sur les droits de l'Homme. L'étape parisienne offre au gouvernement communiste l'occasion de renforcer son image.

Quant aux droits de l'Homme, thème sur lequel Cuba est souvent montré du doigt, ils "seront discutés", assure une source diplomatique française à Paris.

Ce voyage de Raul Castro répond à celui du président François Hollande à Cuba en mai dernier. Selon l'Elysée, la France entend s'affirmer à cette occasion comme le "premier partenaire" politique et économique européen de l'île des Caraïbes.

Plusieurs grandes entreprises françaises ont investi à Cuba, à commencer par le groupe Pernod-Ricard qui y produit le rhum Havana Club, mais aussi Alcatel-Lucent dans les télécommunications et Total et Alstom dans l'énergie. Avec un volume de 180 millions d'euros annuels, les échanges commerciaux restent à un niveau très faible.

Paris voit aussi en La Havane un "élément clé" de la relance de sa relation avec l'Amérique latine. Comme un lointain écho au voyage historique du général de Gaulle en 1964, François Hollande y effectuera fin février une tournée qui le conduira au Pérou, en Argentine et en Uruguay.