Le Nicaragua du président Daniel Ortega, toujours plus isolé sur la scène internationale, aborde une année pleine d'incertitudes, en proie à la crise économique et à la répression tous azimuts du régime contre la presse, les défenseurs des droits de l'homme et les opposants.
Dès le 11 janvier, le Conseil permanent de l'Organisation des États américains (OEA) évaluera si la "Charte démocratique interaméricaine" doit être appliquée, ce qui pourrait entraîner la suspension du Nicaragua de l'organisation.
Une telle décision provoquerait "l'isolement complet du gouvernement", relève le politologue José Antonio Peraza.
Elle impliquerait également le gel de "tous les emprunts et débours de la Banque interaméricaine de développement (BID) et autres organismes multilatéraux" qui financent environ 30% du budget du pays, l'un des plus pauvres du continent américain, souligne l'analyste.
Le pays pourrait également se retrouver privé des bénéfices de certains traités de libre échange qui lient les États-Unis et l'Amérique Centrale.
Le Nicaragua est secoué par une crise politique d'ampleur depuis le 18 avril, lorsque des manifestations ont éclaté contre un projet de réforme de la sécurité sociale, abandonné depuis.
La dureté de la répression a rapidement renforcé l'opposition contre le gouvernement, les manifestants réclamant la démission du président Daniel Ortega, 73 ans, au pouvoir depuis 2007, et de son épouse et vice-présidente Rosario Murillo.
Les violences politiques ont fait depuis lors plus de 320 morts. Au moins un demi-millier d'opposants ont été jetés en prison, tandis que plus de 50.000 Nicaraguayens ont pris le chemin de l'exil.
Le gouvernement a quant à lui recensé 198 morts, 340 arrestations et évalue les pertes économiques à 961 millions de dollars, 120.000 suppressions d'emplois et une chute de 4% du PIB en 2018.
En décembre, le président américain Donald Trump a ratifié la loi Nica Act, limitant l'accès du Nicaragua aux crédits internationaux.
Ces sanctions interviennent alors que le président nicaraguayen ne peut plus compter sur le soutien du géant pétrolier vénézuélien, lui-même en grande difficulté.
Selon des chiffres officiels, le Venezuela, qui finançait le Nicaragua à hauteur de 457 millions de dollars en 2008, n'a apporté à Managua que 9,2 millions de dollars au premier semestre 2018.
Daniel Ortega, qui assure avoir déjoué une tentative de coup d'État ourdi avec les États-Unis, a rejeté l'idée de réduire la durée de son mandat, ainsi que de rétablir le dialogue avec ses opposants, malgré les demandes du patronat et de l'Eglise catholique.
Ayant criminalisé son opposition, le pouvoir a retiré leur personnalité juridique à neuf ONG, tandis que cinq médias indépendants ont été mis à sac et fermés. Deux journalistes ont été emprisonnés et une dizaine d'autres, menacés de mort ou d'arrestation, ont choisi l'exil.
Les opérations policières et les perquisitions chez les opposants se poursuivent dans plusieurs villes du pays, selon des témoignages recueillis par l'AFP.
Pour l'ex-député d'opposition, Eliseo Núñez, "Daniel Ortega continuera à réprimer le peuple jusqu'à ce qu'il se soumette ou jusqu'à ce que la cocotte-minute explose".
Le gouvernement estime pour sa part que la situation dans le pays est redevenue normale et prédit que l'année 2019 devrait être celle de la sortie de crise : le Nicaragua va "reprendre le chemin de la croissance économique et sociale", a assuré Daniel Ortega dans son discours de fin d'année.
Son épouse a quant à elle appelé les Nicaraguayens à garder "foi et confiance".
Selon le sociologue Oscar René Vargas, le gouvernement mise notamment sur les emprunts déjà réalisés pour 2019-2020 pour faire face à la crise, malgré les sanctions internationales.
"La seule chose que veut Daniel Ortega, c'est rester au pouvoir le plus longtemps possible, et cela même si l'économie doit s'effondrer ou s'il doit imposer le même modèle économique qu'à Cuba", affirme Eliseo Nuñez.
Pour une sortie de crise, ce dernier préconise de négocier en garantissant à Daniel Ortega et à sa famille qu'ils ne seront pas poursuivis si le chef de l'Etat démissionne