Présidentielle en Colombie : vote crucial

17/06/2018
Présidentielle en Colombie : vote crucial

Bogota, la capitale de Colombie

Un duel inédit entre droite et gauche se joue en Colombie, au second tour dimanche d'une présidentielle cruciale pour la paix, et qui va désigner le successeur de Juan Manuel Santos, artisan du pacte historique avec l'ex-guérilla Farc. 

Les bureaux de vote seront ouverts de 08h00 à 16h00 locales.

Le champion de la droite dure, Ivan Duque, 41 ans, donné favori promet de modifier ce texte signé fin 2016, selon lui trop laxiste envers les ex-chefs guérilleros.

Ivan Duque, qui pourrait devenir le plus jeune président colombien depuis 1872, affronte Gustavo Petro, 58 ans, premier candidat de gauche à parvenir si loin dans une course présidentielle.

"Nous devons avancer pour continuer à consolider la paix que nous sommes en train de construire", a tweeté vendredi M. Santos, 66 ans, artisan d'un accord qui lui a valu le prix Nobel de la Paix. Mais aussi une impopularité record de 80% dans ce pays de 49 millions d'habitants. Au pouvoir depuis 2010, il ne peut se représenter après deux mandats consécutifs.

Depuis l'accord, 7.000 rebelles ont déposé les armes. 

Si le pacte a clos plus de 52 ans d'affrontements avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), converties en parti politique, la Colombie peine à émerger du conflit. Elle reste confrontée à une corruption et des inégalités criantes, notamment en matière d’éducation et de santé, ainsi qu'à la violence de groupes armés se disputant le narco-trafic dans ce pays, premier producteur mondial de cocaïne.

La droite règne depuis toujours. Son atout, le jeune Ivan Duque, novice en politique, a remporté 39,14% des voix au premier tour le 27 mai contre 25,08% à Gustavo Petro, ancien maire de Bogota et ex-guérillero du M-19 dissout. La participation avait été sans précédent (53,9%). Habituellement moins de la moitié des 36 millions d'électeurs votent.

Dauphin de l'ex-président Alvaro Uribe (2002-2010), farouche opposant à l'accord de paix, l'avocat et économiste Ivan Duque se défend d'en être la "marionnette". Pour ce second tour, les sondages créditent le candidat du Centre démocratique (CD) de plus de 50%, avec six à quinze points d'avance sur Gustavo Petro du mouvement Colombie Humaine.

Mais c'est la première fois que la gauche colombienne, divisée et qui a pâti de la présence des guérillas, arrive au second tour d'une présidentielle.

Ivan Duque, soutenu par les conservateurs, les partis chrétiens, les évangéliques et l'ultra-droite, défend la liberté d'entreprendre et les valeurs traditionnelles de la famille, en agitant le spectre du Venezuela voisin en faillite.

Il veut réviser l'accord de paix pour envoyer en prison les chefs des ex-Farc coupables de crimes graves et leur barrer l'accès au Parlement, éradiquer "le cancer de la corruption" et relancer la 4e économie d'Amérique latine, en berne avec 1,8% de croissance.

"Le discours de campagne pour gagner est une chose, c'en est une autre une fois en exercice. Ce serait très coûteux de revenir en arrière" sur l'accord, avertit Fabian Acuña, politologue de l'Université Javeriana.

Gustavo Petro, chantre d'une gauche antisystème, promet de l'appliquer et de lancer de profondes réformes favorables aux pauvres. Mais il paye sa proximité avec le défunt président vénézuélien Hugo Chavez, bien qu'il ait désavoué son successeur Nicolas Maduro.

Les candidats s'opposent aussi sur le dialogue avec l'Armée de libération nationale (ELN), dernière guérilla du pays. Gustavo Petro veut le poursuivre; Ivan Duque compte durcir la position gouvernementale.

"Nous espérons que quel que soit le vainqueur, il continue ces efforts (de paix) et respecte les accords conclus", a déclaré mardi Pablo Beltran, chef négociateur de la rébellion, en cessez-le-feu pour ce scrutin. 

Dans la dernière ligne droite, les deux adversaires ont limité les déclarations, tentant de nouer des alliances. Le report des voix du centre, dont un candidat, Sergio Fajardo, a obtenu 23,7% au premier tour, pourrait peser. Mais le vote blanc aussi.

"Si Ivan Duque l'emporte, il aura une importante majorité pour faire approuver ses initiatives" au Congrès, où la droite s'est imposée aux législatives de mars, a déclaré à l'AFP le politologue Nicolas Liendo, de l'Université Sergio Arboleda. 

Pour sa part, le parti Farc a renoncé après un échec cuisant devant les urnes: il n'avait même pas atteint les 0,5% de voix nécessaires pour dépasser les dix sièges parlementaires octroyés par l'accord.

Tourner définitivement la page d'une guerre fratricide, qui a fait au moins huit millions de victimes entre morts, disparus et déplacés, sera la principale tâche du futur dirigeant, qui prendra ses fonctions le 7 août, jour de la fête de l'indépendance.

Commentaires

Loading comments ...

Loading comments ...