Venezuela : Maduro cherche à se maintenir au pouvoir

12/02/2016
Venezuela : Maduro cherche à se maintenir au pouvoir

Nicolas Maduro

La justice du Venezuela a validé l'instauration d'un état d'urgence économique dans ce pays asphyxié par la chute des cours du pétrole, accordant des pouvoirs étendus au président socialiste Nicolas Maduro et faisant fi de l'opposition du Parlement.

Le décret est entré en vigueur à partir de sa publication et sa légitimité, sa validité, sa vigueur et son efficacité juridico-constitutionnelle sont irrévocables, a estimé le Tribunal suprême de justice (TSJ) dans un avis publié jeudi soir sur sa page internet.

Le texte prévoit notamment le recours par le gouvernement aux moyens des entreprises privées (transport, distribution) pour garantir l'accès aux aliments, médicaments et biens de première nécessité, ainsi qu'un contrôle des entrées et sorties de liquide.

Cela facilite beaucoup le travail, a réagi le président Nicolas Maduro sur la télévision d'Etat, précisant qu'il annoncerait les premières mesures dans les prochains jours.

Le Tribunal suprême de justice a parlé, sa parole est sainte et doit être respectée par tous les secteurs et toutes les institutions, a-t-il insisté.

Sur Twitter, le député d'opposition Juan Guaido s'est lui insurgé : Le TSJ ne peut pas usurper les compétences du pouvoir législatif.

Le député José Guerra, l'un des plus critiques envers le décret, a estimé que le Tribunal suprême croit être un Etat au sein de l'Etat et pense être au-dessus de la volonté du peuple.

Le décret, instituant cet état d'urgence pour 60 jours renouvelables dans un Venezuela miné par la chute des cours du pétrole, avait été pris par Nicolas Maduro le 14 janvier.

Mais il avait été rejeté une semaine plus tard par le Parlement, où l'opposition est majoritaire.

L'opposition, mais aussi les syndicats et les milieux d'affaires, craignaient que le décret menace la propriété et l'entreprise privées, détruise le pouvoir d'achat et nuise à l'emploi, rejetant de manière globale la poursuite des mêmes stratégies inefficaces face à la crise.

Saisie par des dirigeants du parti au pouvoir, la salle constitutionnelle du TSJ leur a donné raison.

Cette décision n'est pas une surprise, le TSJ étant perçu par l'opposition comme un allié du gouvernement chaviste (du nom du défunt ex-président Hugo Chavez, 1999-2013), mais elle risque d'aggraver encore la guerre de pouvoirs entre exécutif et législatif.

Depuis l'installation début janvier du Parlement, désormais contrôlé par l'opposition, les joutes verbales et blocages institutionnels se multiplient, chaque camp tentant d'imposer son point de vue.

Pour l'économiste Asdrubal Oliveros, directeur du cabinet d'études Ecoanalítica, l'un des plus grands problèmes du Venezuela est l'absence d'un arbitre pour régler le conflit de pouvoirs, et cela complique encore plus la situation.

Alors que le conflit entre les différents pouvoirs s'aggrave, comment cela peut-il se résoudre avec un TSJ partial', se demande-t-il sur son compte Twitter.

Difficile aussi que le TSJ approuve l'amendement constitutionnel proposé par certains dirigeants de l'opposition, dont l'ex-candidat à la présidentielle Henrique Capriles, pour réduire de six à quatre ans le mandat de Nicolas Maduro, qui court jusqu'en 2019.

L'autre option envisagée par l'opposition, pour provoquer un départ anticipé du président, est l'organisation d'un référendum révocatoire, mais la procédure doit être validée par le Conseil national électoral (CNE), organisme proche du gouvernement.

Le pays sud-américain, autrefois un riche producteur pétrolier grâce à ses immenses réserves de brut - les plus importantes au monde -, est plongé dans une grave crise économique avec la chute des cours du pétrole, qui lui apporte 96% de ses devises.

Au quotidien, celle-ci se traduit par une pénurie touchant des produits de base comme le café, l'huile ou les couches pour bébés, obligeant les habitants à faire la queue pendant des heures, d'un supermarché à l'autre, pour pouvoir se fournir.

Le Venezuela souffre aussi d'une inflation parmi les plus élevées au monde - 141,5% sur un an en septembre 2015 - et le déficit public devrait représenter cette année, selon des estimations de cabinets privés, 20% du PIB, lui-même prévu en recul de 8% par le Fonds monétaire international (FMI).

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