Venezuela : le pouvoir recule

01/04/2017
Venezuela : le pouvoir recule

L'opposition réclame des élections anticipées afin de sortir de la crise politico-économique

La Cour suprême vénézuélienne a renoncé samedi à s'attribuer les pouvoirs du Parlement et à conférer des prérogatives élargies au président Nicolas Maduro, qui semble avoir décidé de reculer face à des manifestations annoncées comme massives.

La Cour a d'abord annoncé revenir sur sa décision du 29 mars de s'arroger les pouvoirs législatifs et de priver les députés de leur immunité. Celle-ci avait déclenché une vague de réprobation internationale et marqué une escalade dans la crise politique agitant ce pays pétrolier.

La haute juridiction a ensuite publié une décision annulant les pouvoirs élargis qu'elle avait conférées précédemment au président socialiste afin de réviser les lois sur le crime organisé, le financement du terrorisme et sur la corruption, ainsi que le code pénal et celui de la justice militaire.

Ces décisions interviennent après un Conseil de défense convoqué vendredi par Nicolas Maduro et réunissant les représentants des principales institutions du pays. Il avait "exhorté" la Cour suprême à "réviser les décisions" en question, "afin de maintenir la stabilité institutionnelle et l'équilibre des pouvoirs".

Le président socialiste semble vouloir lâcher du lest dans son bras de fer avec l'opposition antichaviste (du nom de l'ancien président Hugo Chavez, 1999-2013), victorieuse des législatives de fin 2015 et qui réclame son départ. 

Les adversaires du chef de l'Etat ont appelé à descendre massivement dans la rue samedi.

"Nous allons planifier des actions de protestation, lancer un immense mouvement de pression citoyenne et de résistance", a promis le chef des députés de l'opposition, Stalin Gonzalez.

L'opposition réclame des élections anticipées afin de sortir de la crise politico-économique qui secoue le pays. 

Vendredi, la Cour avait été critiquée pour la première fois dans le camp même de M. Maduro. Une haute responsable, Luisa Ortega, la chef du parquet au niveau national, considérée comme affiliée au camp présidentiel, avait dénoncé une "rupture de l'ordre constitutionnel". 

Outre la profonde crise politique en cours, le Venezuela, qui a connu trois tentatives de coup d'Etat depuis 1992, est frappé par une pénurie qui concerne 68% des produits de base, et l'inflation y est devenue incontrôlable (1.660% fin 2017, selon une prévision du FMI).

Le coup de force du camp chaviste avait été fermement condamné par la communauté internationale - Etats-Unis, Union européenne, Nations unies et une dizaine de pays d'Amérique latine - qui avait critiqué le non-respect de la Constitution.

Six pays d'Amérique du Sud avaient condamné vendredi la rupture de "l'ordre démocratique" au Venezuela, et réclamé "son rétablissement rapide", dans une déclaration conjointe publiée à Buenos Aires.

Une réunion d'urgence a été convoquée par l'Organisation des Etats américains (OEA) lundi à Washington. 

M. Maduro a lui fermement mis en garde ses adversaires. 

"Que personne ne tente de profiter des circonstances pour (se lancer dans) des aventures, car la volonté de contrer des aventures putschistes est totale", a déclaré le dirigeant socialiste. 

Le président de la Cour suprême, Maikel Moreno, a participé à la réunion du Conseil de défense, mais pas le président du Parlement, l'opposant Julio Borges, qui a jugé que le chef de l'Etat était disqualifié en tant que médiateur, ni la chef du parquet Luisa Ortega. 

Le vice-président du Parlement, Freddy Guevara, a cependant rejeté l'accord, affirmant sur Twitter que "la pression nationale et internationale se poursuivra jusqu'au rétablissement de l'ordre constitutionnel".

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